Entre avril et décembre 2003, André Benchetrit tient un carnet d'écriture pour « retenir » la femme qu'il aime, Sabine, atteinte d'un cancer du poumon. Elle s'éteint le 12 décembre, en même temps que sont écrites les dernières lignes. Ils vivent « de l'air du temps. Le temps de la radiothérapie. Le temps des caresses. Le temps des douleurs. Le temps des rires ». Ce temps se vit en accéléré, car la vie se ralentit en Sabine. Il pense qu'elle va guérir, puis il sait qu'elle va mourir. Alors il écrit, une fois rendu chez lui, le quotidien de la maladie et de l'amour, en s'adressant à elle. « Je ne sais pas comment j'en suis venu à procéder de cette manière. Ecrire sur ce cahier en m'adressant à toi. Je crois qu'en ce moment nous habitons un espace entre les vivants et les morts. Et peut-être qu'appréhender cet espace, c'est plus facile pour moi quand je te fais passer de l'autre côté du papier ». Dans cette prose qui file au plus près du mouvement des jours, André Benchetrit n'omet rien des traitements, des difficultés concrètes du quotidien, de la douleur. Mais sa rzala, sa gazelle, est espiègle, résistante, intransigeante, fière. Ils s'aiment et font l'amour. Ils passent des nuits à se parler en se tenant la main. Et c'est un chant de vie qui s'élève, exceptionnel d'émotion et de vérité.
Ce texte a été publié une première fois en cinquante exemplaires pour des bibliothèques amies, en 2005, sous la direction de Sébastien Raimondi, des éditions Lignes. André Benchetrit a souhaité le rendre public à titre posthume.